- Gilbert Collard : “Je suis mariniste”

Publié le 12 Mai 2011

Exclusif. L'avocat se rapproche du FN.

Vous avez accepté d’être l’avocat de Fabien Engelmann, militant FN exclu de la CGT, et venez d’animer une conférence devant des cadres du Front national. Après avoir soutenu Mitterrand en 1981, puis adhéré un temps au Parti radical, allez-vous rejoindre le FN ? Je n’ai pas pris ma carte au FN, mais je suis très ami, et de longue date, avec Marine Le Pen. Je suis mariniste. Mon lien est avec elle. Nous discutons souvent ensemble et nous ne sommes, d’ailleurs, pas toujours d’accord. Je ne l’ai pas attendue pour combattre l’euro, le traité de Maastricht ou la perméabilité de nos frontières, mais je suis, par exemple, fondamentalement hostile à la peine de mort. Elle s’en remet, du reste, sur cette question, à un référendum.

Êtes-vous favorable à la “préférence nationale” ? Lorsqu’on me pose la question, je réponds : “Et vous, êtes vous favorable à l’infériorité nationale ? ” La préférence nationale, c’est le contraire du racisme puisque c’est la citoyenneté qui prime sur l’origine, notamment ethnique, des individus. La préférence nationale revient à favoriser un Français d’origine tunisienne par rapport à un Tunisien d’origine tunisienne. Je rappelle aussi que la préférence nationale est une idée socialiste mise en place par Roger Salengro sous le Front populaire.

Qu’est-ce qui vous a incité à vous rapprocher du FN ? En France, dès que l’on ne s’éloigne pas du FN, on s’en rapproche… Trois raisons principales m’ont décidé. La première, c’est le déclin de notre pays, menacé de dilution par le mondialisme, et qui réclame de vraies mesures à la fois de bon sens et “révolutionnaires”. La deuxième, c’est la confiscation du pouvoir, l’abandon du peuple et le déni des réalités du PS et de l’UMP. La troisième, c’est que le Front mariniste est 100 % républicain. Le procès en racisme intenté à Marine Le Pen est totalement obsolète. Marine, je la connais : elle n’est ni raciste, ni anti sémite, ni xénophobe ! Moi-même, passionnément attaché aux droits de l’homme, je ne me serais jamais rapproché de Marine Le Pen si elle n’avait pas levé l’hypothèque de l’antisémitisme. Je n’ai pas changé, c’est le FN qui a changé. On peut aimer la France et la défendre sans pour autant être mécaniquement raciste. Je renvoie les sceptiques au formidable livre de Malika Sorel Immigration-Intégration : le Langage de vérité (lire l'entretien de Malika Sorel avec Valeurs actuelles).

Allez-vous appeler à voter pour Marine Le Pen en 2012 ? J’observe l’évolution du Front mariniste et me déciderai avant la présidentielle en fonction de la confirmation, à laquelle je crois, de cette évolution.

Pourriez-vous ensuite être candidat aux élections municipales à Nice ou à Marseille ? Là encore, je me prononcerai le moment venu. Mais je n’ai pas pour habitude, lorsque je m’engage, de faire les choses à moitié. Je ne m’interdis rien.

Qu’est-ce qui vous a décidé, aujourd’hui, à vous exprimer ? La censure, l’intimidation et la menace. J’ajoute que, si je peux aider, à ce moment charnière, à accélérer la légitime “dédiabolisation” du Front mariniste – dont je constate d’ailleurs que personne ne demande l’interdiction ! – , j’aurai le sentiment d’avoir fait oeuvre utile : l’ostracisme dont il est victime attente à la liberté d’expression – qui est notre bien le plus précieux. Je ne supporte pas la “suinte inquisition”. Cet ostracisme me rappelle celui ayant frappé Socrate, condamné à mort car il était l’homme du discernement : celui qui traque les mensonges derrière les mots, ce qui se cache derrière les apparences ; celui qui dénonce le déphasage des élites avec les choses de la vie ; celui qui combat le conformisme logique (tout le monde se répète), le mythe “vertuiste” et l’omphaloscopie – l’amour de son nombril, qui est le contraire de l’amour des autres…

Avez-vous subi des pressions ? Lors que j’ai pris la défense de Fabien Engelmann, j’ai reçu nombre de coups de fil, sur le thème : “Gilbert, tu es fou ! Tu détruis ton image, on ne t’invitera plus nulle part…” Il est vrai qu’il est si confortable de faire partie de la bulle bien-pensante ! Moi aussi j’ai été intoxiqué, mais je n’ai cessé de m’interroger : est-ce vraiment ce que je pense ou est-ce ce que je “dois” penser ? Et j’ai cherché à comprendre… Je suis viscéralement un esprit libre. Je ne supporte pas qu’une société, ou en l’occurrence un système, me dicte mes comportements. Et cela, de même que l’intérêt de mon pays – « La France, d’abord », comme disait Clemenceau, mon exemple – , passe avant mon petit confort personnel…  Propos recueillis par Arnaud Folch Valeurs actuelles